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Concours d'écriture Love in box

Je me réveille péniblement. Mon téléphone vibre. Il est 7h.

Comme tous les matins, j’attrape l’engin de torture qui m’oblige à me lever de si bonne heure, éteins l’alarme, me roule en boule sous ma couette et gémis.

Comme toujours, je ne veux pas y aller. Une boule se forme dans mon estomac. J’allume mon portable, zéro message. Comme d’habitude.

Je me lève, m’étire, attrape un sweat. J’arrive au salon, embrasse maman. Je ne lui montre rien de mon malaise. Elle s’inquiète assez comme ça pour moi.

Je traîne, cherche un prétexte pour ne pas y aller. Je me rends à l’évidence: il n’y en a aucun. Alors j’avale mon petit déjeuner, lentement, en essayant de calmer le stress qui grandit en moi. Une heure plus tard, je passe la porte métamorphosée, maquillée, coiffée, habillée. Au lycée, comme tous les matins, c’est la cohue. Je joue des coudes pour atteindre la porte et entre dans l’enceinte du bâtiment.

Je suis seule. Je n’ai pas d’amis. Je reçois quelques «Salut, Pauline!» auxquels je réponds vaguement. Je n’aime pas leur compassion.

Nous entrons dans la salle. La routine se perpétue. J’enchaîne les interros et les bonnes notes, au grand désespoir de mes congénères: «Mais comment elle fait??».

Au self, je mange seule à ma table. Certains me regardent en gloussant. Mais comme toujours, je les ignore.

Il faut dire que depuis ce fameux devoir sur la paternité au cours duquel j’ai dû avouer que je n’en avais pas, de père, ils s’en donnent à cœur joie. Ma mère m’élève seule depuis ma naissance. Ça ne m’avait jamais perturbée jusque-là. Mais depuis ce devoir, je ne fais qu’essuyer les gloussements et les rumeurs sur moi.

Le soir, je rentre à la hâte. Je passe la porte épuisée et saute sur le canapé. Je fais retomber la pression. Quand, soudain, une vibration. J’allume l’écran, c’est maman qui me prévient qu’elle rentrera plus tard que prévu. Il est déjà 18h. Je range mon portable en soupirant et me mets à réfléchir à ma soirée -plutôt pâtes bolo ou pizza? quand se produit l’inimaginable. Une seconde vibration. Deux messages en moins d’une minute. Record battu. Un mail. Je n’en ai jamais reçu de ma vie. Un point d’interrogation se dessine dans ma tête quand j’ouvre le fameux message. Mon cœur fait un bond. «Fais-moi signe».

«Salut, Alors voilà, je me jette à l’eau! Je te croise chaque matin devant le lycée et tu ne me vois pas. Mais moi je te vois bien. Pire, je ne vois que toi. J’aimerais bien qu’il se passe entre nous autre chose qu’un échange de regards. Et encore ce n’est pas un échange de regards puisqu’il n’y a que moi qui te regarde. Bref. Fais-moi signe, s’il te plaît. Je t’embrasse.»

A la lecture de ce mail, mes yeux se brouillent. Je vire au blanc, puis au vert, enfin au rouge. Je reste figée. Je suis désemparée. Pourquoi fallait-il que ça m’arrive, à moi? De toutes les filles du lycée, il faut que ça arrive à la seule qui ne veut pas de petit ami. J’ai envie de pleurer.

Mais soudainement la porte s’ouvre et maman apparaît, rayonnante. «Coucouuu!! Finalement je rentre plus tôt!» J’éteins mon portable hâtivement et bégaie «Euh, oui, coucou, ça va? Oui, moi ça va, je, j’étais en train de…» Maman me regarde avec une drôle de tête. Je décide de me ressaisir et file dans ma chambre: «Je reviens!». Je claque la porte et m’enferme, laissant ma pauvre mère béate devant la porte encore ouverte.

La journée qui s'ensuit est catastrophique. Je me retourne au moindre effleurement d’épaule, soupçonne chaque regard. Je ne dors plus. Je ne travaille plus. Je mange à peine. Mais pour ne pas inquiéter maman, j’essaie de faire comme si tout allait bien.

Un matin où je scrute la foule d’un œil soupçonneux devant le lycée, quelqu’un s’avance vers moi. Un garçon. Mon cœur se met à battre plus fort, non pas à la vue de ses yeux noisette au milieu de son visage boutonneux, mais à l’idée que ce jeune homme puisse être mon persécuteur.

«Salut… commence-t-il, hésitant.

-C’est toi, hein?! C’est toi qui m’a pourri ma semaine avec ton mail débile?!

Le garçon blêmit. -Euh… Mais…

-Je savais que tu ne tarderais pas! dis-je en le coupant, toi et tes envies à l’eau de roses! Eh bien si c’est ça, trouve-toi une autre gamine assez idiote pour tomber dans tes bras et fiche-moi la paix, tu veux!?

-Mais… Je voulais juste te dire que… Je me retourne brusquement mais la fin de sa phrase me parvient: -Tu as fait tomber ta carte de self… Donc je voulais te la rendre.» Je vire au cramoisi. C’est pas vrai…J’attrape ma carte des mains de cet inconnu et m’enfuis aussi vite que la foule me le permet.

Dorénavant, en plus de me méfier de la gent masculine de mon lycée, je fais attention de ne plus croiser le boutonneux de la carte de self… Et ce n’est pas facile de vivre en fuyant chaque homme d’un lycée de 1000 personnes. Je commence à perdre espoir.

Le lendemain d’une insomnie particulièrement rude, je passe la grille du bahut comme tous les matins lorsque quelqu’un m’interpelle. Je me retourne et sursaute. Le garçon de la carte de self.

«Salut… En fait j’ai repensé à ce que tu m’as dit à propos d’un mail que t’as reçu…

-Oui? je réponds timidement.

-J’ai remarqué qu’il y a quelqu’un qui te regarde bizarrement quand tu arrives le matin. Mon cœur fait un bond.

-Qui ça? Où? Il tend le doigt et je croise le regard d’un homme. Ce n’est pas un lycéen, c’est un homme d’une quarantaine d’années, voire plus et en effet, il me fixe. Mais quand je tourne la tête vers lui, il s’en va. Le boutonneux me regarde aussi. Je lui lance:

-OK. Tu vas m’aider.»


Le midi, c’est la première fois que je mange accompagnée. Tout le monde me regarde bizarrement, certains poussent des sifflements. Comme d’habitude, je les ignore. J’ai bien assez à faire. Léo (car c’est comme ça que le garçon de la carte de self s’appelle) n’est pas vraiment habitué et semble un peu perdu.

«Fais pas attention à eux», je lui dis.

Et c’est là que notre plan prend forme.


Quelques heures plus tard, à la sortie, le quarantenaire se tient à la même position et me fixe toujours. Je fais semblant de ne pas le remarquer. Le plan ne commence que le lendemain, mais je tiens à vérifier qu’il me regarde toujours. Et c’est bien le cas.

J’ai hâte d’être à demain matin.

Après une nuit cauchemardesque à me demander ce que me veut cet homme, je me lève d’un bond. Aujourd’hui, je vais enfin savoir.

Notre plan est simple. L’homme se tient toujours sur la route en face de celle par laquelle j’arrive. Cette fois, je vais arriver par derrière, pour le surprendre et lui parler. Je ne risque rien au milieu de la foule. Et Léo sera à côté, au cas où. Je marche vite. Mon cœur s’emballe quand j’arrive. Ça y est. Je le vois. Comme prévu, il est de dos, face à la route où il croit que je vais arriver. Léo est déjà positionné, juste à côté. Il n’a pas l’air rassuré. Mais bon, j’ai confiance.

Je continue d’avancer. Je ne suis plus qu’à trois mètres de l’homme. Deux. Un.

«Bonjour? L’homme se retourne. Face à moi, il devient livide.

-On se connait? je lui demande, tout sourire.

-Pas vraiment, non…

-Ah… Comme vous me regardiez bizarrement, je me demandais, je réponds.

Il m’adresse un drôle de sourire. Cet homme est énigmatique, je n’aime pas ça. Il reprend en me tutoyant:

-Je sais qu’on ne se connait pas mais que je t’intrigue. Si ça te dit, on se retrouve à la fin de tes cours à 17h au café, juste là. Il tend le doigt.

C’est le café Chez Josette où les lycéens se retrouvent après les cours. Je ne sais pas quoi répondre. Je tourne la tête vers Léo, il n’est plus là. Je le cherche de la tête partout. Disparu. Je capitule:

-Hm, d’accord..»

L’homme s’en va. Je le regarde, plantée au milieu de la rue. La sonnerie des cours retentit. Je sors de mes pensées et rejoins ma salle.

A midi, je retrouve Léo à notre table habituelle. Je l’interpelle:

«Mais t’étais où?? Tu m’as laissée toute seule avec lui!

-Oui, désolé… Je sais pas ce qui m’a pris… répond-t-il.

-Bon, ok. T’inquiète pas. Il m’a donné rendez-vous Chez Josette après les cours.»

Après délibérations, nous décidons que Léo ira lui aussi dans le café et s’installera quelques tables plus loin.

Quelques heures plus tard, c’est le grand moment. Je suis plus stressée que jamais. Je rentre dans le café, Léo est déjà en place. L’homme m’attend quelques tables plus loin. Je m’approche, m’assois. Après de longues minutes, il tourne la tête vers moi et me contemple. J’ai peur.

«Comment tu t’appelles? me demande-t-il.

-Pauline, je bégaie. Qu’est-ce que vous me voulez? Il soupire.

-Ecoute, Pauline, je ne te connais pas, je ne t’ai jamais rencontrée, je ne sais même pas où tu habites et je sais que ça peut paraître bizarre mais… Il s’arrête. Je dois avoir une drôle de tête car il sourit. Et j’aperçois une petite larme au coin de son oeil quand il me dit:

-Je suis ton père.»




«Et après??»

Le petit rouquin m’interroge de ses grands yeux bruns. Sa sœur assise à côté de lui me demande à nouveau:

«Oui, et après, maman? Je les observe tendrement. Ils sont craquants.

-Et après, on s’est fait un câlin, je leur dis.

-Mais c’était vraiment lui? me demande Emmy en ouvrant grand les yeux.

-Bah oui, rétorque son frère, évidemment! Je les interromps pour éviter une dispute:

-Oui, c’était vraiment lui. Il m’a raccompagnée à la maison, et ma maman s’est mise à pleurer.

-Et Léo, alors?

-Ben à ton avis, répond l’aînée, pourquoi il s’appelle Léo, tonton?

-Tu es très perspicace, Emmy! je la félicite. Oui, Léo était mon demi-frère.

-Et du coup papy il est revenu vivre avec vous?

-Pas vraiment, non. Mais je pouvais le voir quand je voulais. En fait, il habitait depuis quelque temps dans ma ville.

-Waouh! disent-ils en chœur.

-Moi, j’ai bien aimé cette histoire, celle de notre famille! sourit Emmy.

-Ah bon? répond son frère.

-Bah oui! T’as rien compris? Maman, Tom n’a rien compris!

Je rigole. On frappe à la porte de la chambre. Mon père entre et embrasse ses petits enfants.

-Allez, il est l’heure d’aller au lit! Je les câline sous les protestations puis sors de la pièce en les observant. Je ferme doucement la porte.

-Tu crois qu’ils ont compris? je demande à mon père.

-Mais oui, mais oui!»


Et il me prend dans ses bras.



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